Engels, jeune bourgeois allemand, part pour l'Angleterre en 1842 pour travailler dans une filature appartenant à son père. Il découvre les ravages d'une révolution industrielle qui plonge les ouvriers dans une grande misère. Révolté, il décide de relater ce qui s'étale devant ses yeux afin de faire connaître au monde civilisé la dégradante situation où il leur faut vivre.
Ce sera La situation de la classe laborieuse en Angleterre qui exercera sur Karl Marx une influence décisive.
Filmé au Théâtre de l'Usine par Maud Alessandrini (durée : 62 minutes) Suivi d'une conférence (50 mn) d'Annie Lacroix-Riz, professeur émérite d'histoire contemporaine à l'université Paris VII (filmée par les Films de l'An 2).
À travers des rencontres avec ses activistes d'hier et d'aujourd'hui, le film dessine l'histoire du fanzinat en France : ses créateurs, son lectorat, ses enjeux, ses techniques, son esthétique, son économie... Destiné aux initiés comme au grand public, le documentaire fait raconter l'histoire des fanzines par celles et ceux qui l'ont faite et qui la font encore. Le spectateur est amené à comprendre à quel point la culture fanzine a joué un rôle déterminant dans des domaines aussi variés que le graphisme, l'illustration, les musiques indépendantes, le féminisme ou encore les supporters de football... Avec Bursty 2 Brazza, Pakito Bolino, Marsu, Moolinex, Pacôme Thiellement, Delphine Bucher, François Cognard, Christophe Lemaire, Coxs, Samuel Etienne, Freak City, Frank Frejnik, Violette Gauthier, Thomas VDB, Cora Wang-Chang, Véronique Servat, Marie Daubert, David Pujol, Thomas Viallefond, Alexandra Bey, Didier Bourgoin, etc.
Une tendance profonde traverse actuellement la société conduisant ceux qui ont fait le tour de la société de consommation à s'interroger sur le sens de ce qu'ils font, sur leur épanouissement et qui se traduit par une attention pour l'alimentation, la qualité de la vie...
Les films de Gérard Guérin ne donne pas une vision idyllique de la campagne mais pour qui cherche à renouer avec un autre rythme - celui de la nature obligeant à être patient - le film est très instructif, rappellant la liberté et la sagesse des paysan(ne)s.
Le projet Accompagner les étrangers primo-arrivants a été coordonné par Valérie Wolff de l'ESEIS sur une durée de 5 ans (2017-2021). Cet ouvrage conclusif décline les résultats du projet comprenant une phase de formation et une recherche-action. Certains articles dépassent le cadre de la recherche conduite, ils permettent d'éclairer les appartenances culturelles, les difficultés rencontrées, voire les qualités requises ou souhaitées dans la relation d'aide et dans les pratiques d'accueil et d'accompagnement ; en somme ils relatent tout qui se passe ou ne se passe pas lors du processus d'intégration. À partir des expériences vécues et dont nos auteurs font la traduction, nous abordons trois dimensions essentielles de l'accueil et de l'accompagnement : le décalage entre objectifs politiques et réalité, la délicate question des frontières et de leurs franchissements, et la question du sens et le manque de la dimension interculturelle.
LE FILM Trente six semaines dans la vie d'un pays qui va se choisir, pour cinq ans, un président nouveau. Inventaire avant élection, au café, chez le coiffeur, à l'atelier, des moments choisis dans la vie du pays. À bonne distance des idées faciles et du cynisme ambiant, Luc Leclerc du Sablon part à la rencontre des habitants de ce pays, pour parler des lendemains qui se dessinent.
Une autre montagne est un film sur la résistance quotidienne des femmes en Turquie. Deux cinéastes nous entraînent dans un voyage à la rencontre de trois femmes, libres, féministes et combatives, Burcu, Sinem et Ergu?l, qui mènent un combat politique sur plusieurs fronts, dans la rue comme dans leurs espaces de vie intime.
Le film met en lumière, avec justesse, l'héritage des luttes passées et leur nécessaire transmission pour les générations futures. Une Autre Montagne fait écho aux femmes kurdes qui rejoignent le maquis, et fait résonner une solidarité inconditionnelle d'est en ouest de la Turquie contre le nationalisme, la guerre, le patriarcat. Bonus d'Ozho Naayé et livret.
En 2007, quand j'ai demandé à Bernard Gainier si je pouvais le filmer dans son quotidien, il m'a répondu que j'avais vraiment du temps à perdre, c'est ce que je cherchais à filmer justement... le temps perdu. Ne réalisant pas l'intérêt de ma démarche, pourquoi filmer « un pésan com'moué », il m'a fallut m'armer de patience. Le tournage a duré trois ans.
C'est à la sortie du film au cinéma en 2010 qu'il a commencé à comprendre mon obstination... Il était « en haut de l'affiche » et les réactions du public furent tout de suite chaleureuses et enthousiastes. Bernard devenait un héros de cinéma... malgré lui.
S'il n'a que faire des honneurs, l'homme est tout de même fier de cette reconnaissance tardive. Lui, le gardien d'une mémoire paysanne, le passeur d'une poésie populaire, impertinente et libre, et d'une langue, le patois beauceron, qui disparaitra avec ceux de sa génération. Bernard est un « diseux » resté fidèle à une tradition libertaire et humaniste qui a marqué sa ville de Meung-sur-Loire. Rabelais y écrivit son Pantagruel, François Villon fut jeté dans les geôles de son château, et c'est là que grandit le poète Gaston Coûté, « Le Rimbaud de la Beauce » qui connut son heure de gloire dans le Montmartre de la Belle Époque.
"210 millions de femmes, d´hommes et d´enfants, dans 50 pays, sont persécutés en raison de leur foi. Imaginez si, sur les 508 millions d´habitants d´Europe, les Français, les Italiens, les Allemands et les Belges étaient chaque jour en butte aux pires maltraitances : bastonnade, lapidation, tortures en tous genres, viols, emprisonnement, discrimination, assassinat. Sur simple dénonciation, pouvant à tout moment être accusés de blasphème. Et cela, dans le silence assourdissant des États, et des Commissions des droits de l´homme de l´ONU, et de l´Union européenne. Le film entend montrer ce que recouvre le terme générique de ""persécutions"" avec l´aide de témoins . comprendre pourquoi au XXI° siècle on tue des chrétiens . mettre à jour la faillite des États, la disparition de la liberté religieuse et de conscience, promise en 1948 avec la Déclaration universelle des Droits de l´Homme. "
Dans plusieurs pays du Moyen-Orient et d'Asie centrale, on jette de l'eau derrière celui qui s'en va pour qu'il revienne en bonne santé. On les appelle, migrants, kaçak, metanastes alors qu'ils sont Aziz, Sidiqi, Housine, Younes. Nous traversons avec eux ces villes non-lieux et ces zones frontières, grandes comme des pays entiers. Du foyer au chaos de la Grèce en Crise, en passant par les rues d'Istanbul. En filigrane de leur voyage, les rêves, les espoirs qu'ils portent. Il n'en est qu'à son début et ne trouvera peut-être jamais de fin. C'est l'histoire d'une Europe, de ses frontières et de ses polices. Une histoire d'exil. Comment se raconter, dire son voyage, quand il s'agit de sa vie ?
Ce film est une chronique villageoise d'une année à Sérignac, 500 habitants, dans le Tarn-et-Garonne. « On traverse le village comme la vie ». L'année est rythmée par les temps ritualisés, la Toussaint, le 11 novembre, la fête votive, la fête des battages, les manifestations associatives. L'espace du village est découpé par les lieux de mémoire, de rencontre, d'intégration, de services, de loisirs. Les habitants nous parlent de leur village, de leur commune, des manières d'habiter, des sentiments d'appartenance, de comment on peut être rural aujourd'hui, de l'identité communale face aux recompositions territoriales. Ce film, issu des travaux du Laboratoire de Dynamiques rurales de l'ENFA, en partenariat avec l'UTM et l'ENSAT, pose la question du sens de la petite commune rurale aujourd'hui, dans le cadre des recompositions territoriales.
Bilakoro, raconte la vie quotidienne de trois femmes face à l'excision.
De Bamako à Paris, Awa, Kadidia et Inna parlent de leurs douleurs malgrés la pression culturelle qu'elles subissent.
Chacune, à sa manière lutte contre l'excision.
Au-delà d'un relief barré par un horizon hostile et sauvage, une terre à l'écart s'ouvre aux pèlerins. Ancrée dans les traditions millénaires, cette contrée réunit un peuple unique, qui en fait un lieu de contraste où philosophie religieuse le dispute au dénuement le plus extrême. Cette région du centre de l'Inde, isolée, voir presque oubliée du Madhya Pradesh accueille aujourd'hui les descendants de ceux qui ont lutté pour rejeter toutes formes de discriminations sociales et religieuses.
Ce lieu ensorcelant n'est pas de ceux que l'on parcourt en simple spectateur, il véhicule avant tout une forme de culture et de philosophie religieuse: la Ramnami Samaj. Cherchant à créer un environnement ou chacun pourrait participer librement à des pratiques de dévotions, ce courant allait ôter toutes restrictions généralement imposées par les règles du système des castes. Prospère sur le plan de la conscience religieuse et sur le statut de ses membres, elle a contribué activement à l'amélioration et au développement de leur situation sociale.
En s'appuyant sur le témoignage d'un jeune animateur nature, le propos est de découvrir ce qui fait l'essentiel du métier en abordant les activités incontournables, les compétences requises, les motivations qui l'ont amené à choisir cette voie, les satisfactions qu'il en retire et, selon les cas, la ou les difficultés rencontrées.
En s'appuyant sur le témoignage d'un jeune lad-jockey, le propos est de découvrir ce qui fait l'essentiel du métier en abordant les activités incontournables, les compétences requises, d'entrevoir la ou les raisons, les motivations qui l'ont amené à choisir cette voie, les satisfactions qu'il en retire et selon les cas la ou les difficultés rencontrées.
Jankiri habite une région isolée du Népal. A 76 ans, rien ne le distingue à priori des paysans voisins. Il cultive ses champs autour de sa maison, trie son maïs, coupe son bois. Mais il est aussi shaman.
Et comme chaque année, la nuit fatidique approche.
Celle où ses pouvoirs, alliés à ceux des autres shamans de la région, vont permettre "d'aller chercher " l'esprit des ancêtres au coeur de la forêt et de le capturer. Cet esprit va être aussitôt emmené sur un sommet, à 3 500 m d'altitude, pour protéger les habitants de la vallée pour l'année à venir.
C'est un challenge périlleux et délicat, voire incertain. Déranger les esprits exige une grande maîtrise de la part des shamans qui prennent toutes les précautions nécessaires pour se protéger au cours de cérémonies secrètes et macabres.
A cette occasion, j'ai eu le privilège d'être témoin de phénomènes inconcevables pour un esprit rationnel...
Peter Friedman a fini le journal vidéo que Tom Joslin, malade du sida, avait commencé peu de temps avant la mort de son compagnon Mark, lui aussi atteint du sida. Mémoire d'un couple homosexuel vivant à Los Angeles en 1993, ce document a été l'un des premiers à montrer ce qu'est vivre et mourir du sida. C'est d'abord une histoire d'amour glorieusement assumée entre deux hommes, Tom et Mark. « Un film d'amour (...) sur un couple uni jusqu'au bout, envers er contre tout. Les dernières minutes sont parmi les plus poignantes qu'on ait jamais vues au cinéma. » (TÊTU). « Chronique sans voyeurisme, douloureuse, effrayante, mais où, envers et contre tout, domine la tendresse. » (TÉLÉRAMA). « Une oeuvre dérangeante, parfois insoutenable dans sa volonté de tout montrer, mais remarquable. » (LE MONDE). « Contre les faux et images de faux, le documentaire comme un coup de cutter. » (LE NOUVEL OBS). « Beau et nécessaire. » (LIBÉRATION). BONUS : HORS DU PLACARD EN LOUISIANE PROFONDE de Peter Friedman
Ce DVD regroupe trois documentaires abordant les comportements des adolescents : amour, rivalité, etc. "Je t'aime" d'André Targe (26 min.) 14 ans... Le collège... Des jeunes gens, garçons et filles, aimantés par un mot d'ordre. Lequel ? Oh, peu de choses, rien de sensationnel. Il s'agit de dire "je t'aime", ou de ne pas le dire... Mais justement, tout est là : une manière de parler, une façon d'agir, aussi loin des adultes que des enfants, un monde intermédiaire, celui des histoires d'amour ! Pas les vraies, celles des grandes personnes, ni les fausses, celles des films. Les nôtres. Celles qui nous arrivent. On a 14 ans et l'on s'appelle Elsa, Fabien, Chloé, Emilie ou Kevin. Écoutez-nous, on vous raconte... "La Bande à Édouard" de Pierre-Yves Moulin (26 min.) Marine, Alexis, Jérôme. Ils ont 17 ans, étudient dans le même lycée privé, se retrouvent à chaque récréation, mangent à la même table de cantine. Ensemble ils programment leurs sorties, leurs loisirs. Ils ont besoin les uns des autres. Ils ont des règles qu'ils ont définies, et qui les définissent. Des « commandements » qui délimitent leurs libertés autant que leurs contraintes. Et puis ils ont Édouard, le chef incontesté. Incontestable ? "C'est cool ?" de Myriam Copier (26 min.) Aujourd'hui, les jeunes s'adonnent au cannabis. Au lycée, dans leur quartier, à la campagne, partout le phénomène se banalise, mais il inquiète. Que dire ? Que faire ? Comment expliquer ? Comment réprimer, et d'abord... le faut-il ? Clémence, Kamel, Alexandre, Brice ont leurs idées sur la question. De prés ou de loin, spectateurs ou acteurs, ils ont accepté de parler franchement, de raconter : la première fois, l'acceptation ou le refus, l'envol ou la défaite, les conséquences, les doutes. Ont-ils une explication à tout ça ? Et nous ? Avons-nous une explication ?
Joseph, aîné d'une fratrie de 4 enfants, naquit le 30 avril 1930 aux Avirons. Dans cette famille pieuse comportant un chanoine, le père était forgeron comme ses aïeux depuis presque deux siècles. Petit propriétaire terrien avec quelques colons, pratiquant également le petit élevage, il présida même le premier syndicat agricole de la ville.
Elevé strictement, dans le respect des règles de bonne conduite, Joseph eut aux Avirons une enfance heureuse partagée entre le sérieux de l'école et le plaisir du ruisseau avec les enfants de son âge Exilé au lycée Leconte de Lisle qu'il rejoignait en train, il apprit à apprivoiser la ville, à faire ses premières rencontres marquantes, le prince Vinh San ou Abd el-Krim, et devint bachelier (mention AB) en 1950. Il part alors pour la faculté des Sciences de Montpellier où il obtient un PCB (Physique, Chimie, Biologie), fait connaissance avec Marc Rivière et assiste à la Semaine sociale de Joseph Folliet, s'initiant ainsi à l'apostolat social dans la tradition de Marc Sangnier.
Admis en 1951 au Séminaire des vocations tardives de Toulouse où il apprend à admirer le cardinal Saliège, il intègre enfin le Séminaire colonial de Paris (1952-1954). Là il fréquente des étudiants réunionnais, crée un bulletin qui lui permet d'échanger avec Ary Leblond, rencontre Monseigneur Roncalli, participe enfin aux recherches sur la doctrine sociale de l'Eglise, traversée par les questions du capitalisme, du socialisme et du colonialisme. C'est alors qu'il décide d'accorder une fois pour toutes, sa vie, sa foi, ses principes, et ses actes.
De retour à La Réunion, il devient professeur...de Lettres et d'Anglais dans l'enseignement public, se marie en 1955, entre au SNI qu'il juge vite trop politisé et surtout trop divisé par l'obsédante question du statut. Il intègre enfin le Grand Orient de France en 1957.
Désormais structuré et déterminé dans ses idéaux humanistes, pour lui à la fois chrétiens et francs-maçons, il n'a de cesse de batailler pour écarter une autonomie jugée floue à laquelle le «peuple» n'est pas préparé, tout en luttant pour une société plus juste sans rupture avec la France. Ni dans le PCR, ni dans le PSR, ni dans le PSIR, ni socialiste départementaliste intransigeant, il paraît isolé et ne récolte qu'insultes et sarcasmes (comme pour l'élection cantonale des Avirons en 1967), malgré une campagne qu'il avait imaginée efficace puisque propre. Il parvient au moins en 1974, en tant que mandataire de F. Mitterrand, à constituer pour la présidentielle une unité conjoncturelle de la Gauche, hélas sans lendemain. Ses origines, l'éclectisme de son parcours, sa soif consensuelle d'humanisme, provoquent en effet plus de rejet que d'adhésion!
Mais J.Mondon reste fidèle à ses engagements. Il souhaite l'alliance «gaullienne» du Capital et du Travail, désire aujourd'hui comme hier une évolution maîtrisée du statut, souhaite plus que jamais l'apparition de tuteurs politiques honnêtes, ouverts, lucides sur les «réalités» insulaires afin d'aider les Réunionnais à sortir de la misère, du chômage, du consumérisme, de la dépendance, notamment alimentaire. Depuis une douzaine d'années il diffuse à travers l'ADELROI du sociologue Vandewynckele, l'idée d'une démocratie de la «transfrontalité» dans l'océan Indien.
Sur un ton mesuré, conciliant, allusif ou elliptique, pour ne blesser personne et ne pas polémiquer, les confidences de J.Mondon incarnent davantage la sagesse idéalisée qui l'a toujours guidé qu'une cohérence politique mobilisatrice qu'il a toujours désirée.
Plus qu'un autre peut-être J. Mondon révèle et souligne par ses origines, sa vie, ses idées et ses actions parfois avortées, les écartèlements destructeurs qui affaiblissent La Réunion.
Edmond Maestri
David a 14 ans. Un soir de 14 juillet, il part faire la fête avec l'un de ses copains sans avoir vraiment l'assentiment de ses parents. Quelques heures et quelques verres plus tard, ils rentrent chez eux en mobylette, sans éclairage et prennent la route nationale. Ils croisent des voitures jusqu'à ce que l'une d'elles, ne voyant aucune lumière sur l'autre voie, en double une autre... La suite est hélas d'une effroyable réalité...ØCe film est le récit de cette histoire avant et après l'accident, raconté par le père et par le fils. Des visions décalées de l'événement et un dialogue, par caméra interposée, qui n'avait pas encore pu avoir lieu. Au-delà de l'accident et du handicap, c'est tout un rapport à l'existence qui nous est proposé...
Michel Chung-Poo-Lun est né à Saint-Louis en 1939 de parents venus de Chine et arrivés à La Réunion une dizaine d'années auparavant. Il est le 1er fils mais 5ème enfant d'une fratrie de 10. Il rapporte ici le départ de Canton de son père, choisi parce qu'il était en bonne santé et « savait compter », gage absolu d'une réussite qui ne pouvait aboutir que dans le commerce, l'accueil de sa mère dans la famille de la soeur de son père, la barrière terrible de la langue, la défiance des autorités.
Michel témoigne aussi d'une farouche volonté familiale d'intégration : acceptation des règles et des symboles nationaux du pays d'accueil, glorification de l'Ecole, et parfois naturalisation, francisation des noms, conversion au catholicisme.
Sans pour autant que ne soit oubliée la culture structurante d'origine à travers les rites funéraires, la solidarité, le maintien des liens avec la Chine, un syncrétisme religieux de fait, l'inculcation du respect. Respect et fierté du pays d'origine comme du pays d'accueil, de la famille, des aînés, de la valeur « travail ». C'est l'histoire d'une identité duale, en perpétuelle construction par la mise en cohérence de deux civilisations.
La description du monde de la boutique et de l'arrière-boutique constitue un extraordinaire document ethnographique : quotidien étriqué, pratiques commerciales astucieuses (carnet de crédit, récupération systématique, petites fraudes, gestion des stocks) avant l'inéluctable évolution vers la « superette », ou la société de commerce, autres formes d'adaptation culturelle !
Mais quand ce fils d'immigrés collectionne tous les objets usuels qui ont jalonné sa vie et raconte avec émotion ses rencontres avec des « personnalités », il se livre non seulement à une intéressante oeuvre patrimoniale et mémorielle, mais surtout à l'appropriation de son histoire dans le cadre réunionnais et à l'acceptation heureuse de son destin métissé.
Edmond Maestri
A travers sa tumultueuse existence, Emmeline PAYET, née par hasard à Marseille en 1935, évoque non seulement une fascinante saga familiale mais l'histoire d'une île façonnée par le sucre, tiraillée entre l'eldorado malgache et le tropisme métropolitain.
L'aventure débute à la fin du XIXe siècle quand Yvrin PAYET son grand-père, garçon de cour, fait petite fortune à Madagascar pour être en mesure d'épouser la fille de son patron. Il s'ensuit une belle ascension qui conduit le patriarche à la tête du domaine de « BEL AIR ».
C'est là qu'Emmeline apprend son île et les humanités, le catéchisme et la vie, les réalités économiques et la spiritualité de lieux métissés, l'existence de gens aisés dont elle fait partie, et de pauvres « de couleur » qu'elle n'hésite pas à fréquenter, elle la fille d'Edmond PAYET et d'une mère française catholique et monarchiste. C'est l'âge d'or, dominé par la sévérité de grands-parents et de parents cultivés, la fructueuse mais cruelle (pour les pauvres) éducation religieuse, l'éveil des sens et la structuration d'une personnalité rebelle, sensible à l'injustice.
Lorsqu'en 1951, son père rejeté de « BEL AIR » par sa propre famille, préfère l'exil en Métropole, une douloureuse expérience commence pour la jeune Réunionnaise. Ballottée entre le métier d'infirmière et celui d'enseignante, elle erre entre la Côte varoise où ses parents se sont installés, le Maroc et Israël, connaît une relative misère, la vraie dépression, les déceptions sentimentales, sans cesser de s'intéresser au monde.
C'est peut-être cette incessante ouverture aux autres et à la vie qui, de retour à La Réunion avec ses 3 enfants, lui fait tant aimer les parfums de son île, ses habitants, ses jeunes, et tous ceux qui, par la musique, la littérature ou le théâtre, savent se dépasser.
Avec la force d'une croyante, la révolte indignée d'une « juste », Emmeline semble avoir traversé sa vie avec lucidité, courage, et une apparente et troublante innocence.
Revenue dans son espace d'expérience, elle a « bricolé » une identité bien personnelle qui rassemble les charmes mystérieux de l'insularité et les voies parfois chaotiques du développement réunionnais.
Edmond Maestri