La loi a donné le droit aux personnes de même sexe de se marier et d'adopter. Elle porte un enjeu de société et met en avant l'institution du mariage et une fonction parentale qu'elle dit "libre" plutôt que liée au sexe ou au genre. Que deviendra l'enfant ? S'intéresser à la question de savoir s'il est bien ou mal, juste ou pas, révolutionnaire ou régressif que des personnes de même sexe se marient semble plus aisé que d'examiner ce qu'il advient de l'enfant.
Chacun est d'accord que deux personnes de même sexe sont parfaitement capables d'élever un enfant avec l'amour nécessaire. Mais cette vue très simple de l'amour parental est inexacte : elle ne tient pas compte des mouvements inconscients propres à chacun ni du destin de ces mouvements. Le fameux amour parental couvre les besoins. Que sait-il de son désir, qui mène une vie secrète dans le conflit psychique interne, déguisé et vital, propre à chaque enfant comme à chaque enfant que le parent a été, et qui continue sa vie en lui ? Avec notamment une histoire de deux couples homoparentaux plus vraie que nature par François Bégaudeau, des réflexions engagées de Jean Clair et Geneviève Delaiside Parseval, une promenade dans l'histoire des questions homosexuelles dans l'Antiquité de Jackie Pigeaud, des cas d'analyse d'enfants (Caroline Thompson, Jocelyne Malosto, Annick Merken), un parcours critique du rôle des "psys" dans la presse de ces derniers mois de François Richard, la lettre refusée par Le Monde de François Gantheret, un point de vue sur le rôle de l'État de Caroline Eliacheff, un dialogue troublant entre Bouvard et Pécuchet de Catherine Rodière-Rein, une lettre argumentée à Freud pour lui demander ce qu'il pense de tout ça de Gilberte Gensel, etc.
ÿþ " Le temps du trouble, c'est le passé, la manière que chaque discipline a de l'inventer. Le temps du trouble, c'est aussi le présent, à l'instauration et au service duquel finit tout ce qu'on dit, tout ce qu'on pense. Et c'est le grand mouvement incertain qui va de l'un à l'autre et les remanie tous les deux, présent et passé: c'est le temps de l'après-coup - le créateur d'événements.Le temps du trouble, c'est aussi l'époque actuelle, quand la crise de la conscience européenne annonce aujourd'hui la fin des Lumières.Ce numéro salue ainsi le premier roman français en date, son histoire, les ressorts inconscients de l'amour, et l'héroïne de ce roman - la très troublée princesse de Clèves -, dénoncé par les délégués d'une société qui veut en urgence en finir avec le concept même de trouble.
" Avec des contributions de psychanalystes: Françoise Laurent, Alberto Semi, Daniel Oppenheim, Alberto Luchetti, Catherine Rodière-Rein; d'historiens: Christian Jouhaud, Judith Lyon-Caen, Nicolas Schapira, Dinah Ribard; de littéraires: Alain Cantillon, Laurence Giavarini; du philosophe Jean-Michel Rey; de l'anthropologue Jeanne Favret-Saada; et avec un entretien entre l'astrophysicien Michel Cassé et l'écrivain Pierre Bergounioux.
L'adjectif possessif - « L'intime et son spectacle » - le fait entendre d'emblée : l'intime ne va pas sans l'idée qu'il recèle un spectacle qui lui est propre. N'aurait-il jamais de consistance en lui-même ? Les affaires sexuelles spectaculaires posent la question : qu'est-ce que l'intime, dès lors qu'il se prête à l'instrumentalisation publique ? Existe-t-il même, si l'on peut en faire un objet de communication ? L'intime est à la Une ! On en a plein les yeux et les mots. Tout ce qui est dedans doit-il être dehors pour répondre aux exigences d'un scénario spectaculaire ? L'intime pourrait-il faire la Une sans être conçu comme ce qui est par nature dissimulé ? Corollaire : quelle intimité indicible, non montrable, cache le tableau de Courbet, L'origine du monde ? Quelles formes ont l'intime et l'intimité si elles existent en deçà et au-delà de leur spectacle ?
Aujourd'hui que le spectacle est celui d'une prostituée mineure débauchée par un footballeur et devenue l'égérie d'un grand couturier, aujourd'hui qu'Internet propose des photos dénudées de telle Première dame, peut-on faire entendre une autre question dans sa banalité même : et si l'intime était ce qui intimide ?
Il n'est question que de ça aujourd'hui : maltraitance des enfants, mauvais traitements infligés aux femmes, femmes sous-payées, exposées aux provocations, soumises à l'intolérance ou à l'exclusion par des religions d'État ; privation de la liberté de circulation touchant des individus et des populations en détresse ; mais aussi mauvais coups portés à l'éducation nationale et aux idéaux républicains et peut-être à la République elle-même : de toute part, on contrevient aux articles 1, 2 et 5 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, que condense l'article premier - sur la liberté et l'égalité en droit des hommes à leur naissance - de celle de 1789. Le racisme a droit de cité, quelle que soit l'éducation des milieux considérés, quelle que soit l'intervention en chacun d'un refoulement supposé civilisateur.
Quel éclairage attendre de la psychanalyse ? La psychanalyse ne devrait-elle pas d'abord faire son propre ménage ? Qu'est-ce qu'un mauvais traitement en psychanalyse - quand on sait qu'on peut attendre un effet thérapeutique d'une interprétation inexacte (Edward Glover) ou d'une défaillance de l'analyste (Winnicott) ? Ou quand on sait que la psychanalyse rend malade (Pontalis), et qu'une certaine dose de maltraitance organise de toute façon la technique analytique, en ne répondant pas à l'amour par de l'amour, en étant apparemment indifférent à la haine ? Le psychanalyste ne se fait-il pas la part trop belle en considérant tout uniment le oui et le non de son patient, son accord et son désaccord ?
De même qu'il n'existe un modèle unique de l'analyse, on ne peut trouver de portrait au singulier de l'analyste ordinaire. L'analyste " extraordinaire " est, quant à lui, toujours unique dans le tableau qu'en font ses adorateurs. Mais est-il encore analyste ? Anna Freud rapporte une conversation avec son père sur ce sujet, dans une lettre à une amie en août 1926 :
" Récemment, papa et moi sommes tombés d'accord, dans une conversation, pour estimer que l'analyse n'est pas une affaire d'êtres humains, mais qu'on devrait être quelque chose de bien mieux - je ne sais toutefois pas quoi. " Les collaborateurs du numéro 22 de la revue penser/rêver se proposent ainsi de répondre aux problématiques suivantes : Un psy ordinaire est-il un psy " sans qualités " ? De quels lieux peut-on percevoir l'ordinaire ? L'ordinaire psychanalytique est-il comparable à d'autres ? Et la démarche freudienne est-elle compatible avec autre chose - une politique, une éthique, un savoir, une croyance, etc. ? - qui serait à la fois sa limite et un champ nouveau, à annexer ? Comment expliciter les recommencements nécessaires, quels noms leur donner ? Peut-on reconstruire une généalogie de la démarche freudienne ? Et si le " sans fin " de l'étude de Freud avait été pris pour un " sans limites " ?
La tentation totalitaire refait sans cesse surface. En deçà des conditions économiques et politiques qui produisent sa constante réémergence, existent des motifs individuels propres à un genre totalitaire qui gît en chacun : tout bébé a vu ses besoins totalement pourvus, et l'imaginaire des rêves s'est chargé de réaliser ce qui lui manquait malgré tout dans la vie réelle. Narcisse était le modèle, et la vie agréablement totalitaire n'avait qu'une idée : nous - c'est-à-dire me - prendre totalement en charge.
Comment une illusion infantile devient-elle une idéologie ? Comment peut-elle être prise au sérieux jusqu'à devenir un idéal sociétal, de type « mono », voire une organisation fanatique. Comment peutelle concevoir qu'un appareil de vie se replie sur lui-même jusqu'à l'autosuffisance ? Car le totalitarisme de la mono-représentation ou de la pensée unique tire sa jouissance de lui-même. Il offre un intime sans trouble, fait perdre le divers. Il a le goût de l'uniforme et de la dénégation. Problème :
Le fantasme quasi réactionnaire en ce qu'il s'oppose au changement ; l'exigence pulsionnelle ; la cruauté obscène du surmoi ; le masochisme primaire ; l'attrait mélancolique ; la compulsion de répétition qui vous ramène là où vous ne voulez pas - sans oublier le transfert : les fonctions et productions de l'inconscient sont-elles autant d'instances totalitaires ?
L'Enfant très malade ne rappelle en rien les travaux existants ni les livres antérieurs de Daniel Oppenheim. Son absolue nouveauté coïncide sans doute avec la réflexion, au sens propre, le retour sur soi qui s'impose quand vient le terme d'un engagement. Daniel Oppenheim vient en effet d'arrêter un travail de quelque vingt-cinq années à Villejuif, dans un service médical de pointe : l'enfant très malade est un enfant cancéreux. Peu de livres font voir avec un tel mélange de force et de retenue la double présence de l'enfant et celle de son thérapeute psychanalyste : l'enfant qui est atteint dans sa vie, même lorsqu'il guérit ; le thérapeute, que la blessure faite à l'enfant et à l'enfance ont marqué définitivement, et qui ne cède jamais. C'est aussi que la " leçon " psychanalytique a ici sa pleine portée : à savoir qu'entre l'enfant très malade et l'auteur, au coeur même de la double présence, on ne trouve pas une relation duelle, interpersonnelle, mais l'activité, le moteur d'un troisième terme. Il y a un ailleurs qui donne sens aux fantasmes, rappelle au chaos l'ordre qui lui est sous-jacent et qui s'impose aux deux acteurs, règle le déroulement, les actes et les scènes de la tragédie.Cet ailleurs, dans ce livre magnifique, est figuré par le dessin. Daniel Oppenheim n'interprète pas le dessin car le dessin parle. Il parle si bien, il est si bien raconté par l'auteur qu'il n'a pas besoin d'être reproduit - aucune reproduction donc dans ce livre. Reste alors, pour le lecteur, le sentiment d'avoir été admis, amicalement, par l'enfant lui-même, à élargir sa compréhension -sous l'oeil attentif du Dr. Daniel Oppenheim.
Penser/rêver n°14 L'Inadaptation des enfants et de quelques autres COLLECTIF 16 Octobre 2008 [Octobre 3]Rayon : Toutes les revues Collection : Revue Penser/Rêver Editeur :
Broché / 150*215 240 pages Prix : 20 euros ISBN13 : 978-2-87929-637-1 De l'enfant agité de trois ans, futur délinquant dépistable, aux banlieues chaudes, banlieues dites " à risques ", où le mot " risque " incarne l'inadaptation de manière péjorative, l'époque semble à l'heure de Procuste, et découpe, ici ou là. La visée est que ça s'adapte, que ça entre dans une mesure généralisée, agréable pour partie au sens commun et pour partie à une conception fonctionnelle, réductrice de l'individu et de la collectivité, conception non pensée comme telle et qui ouvre la voie à l'idéologie cognitiviste.
Il y a au moins deux propositions freudiennes concernant le but de la cure analytique : la capacité d'aimer et de travailler, et la transformation de la misère psychique en malheur banal - plus modeste, la seconde laisse entendre, à l'inverse de la première, que l'inadaptation possède un caractère constitutif et qu'une certaine inadaptation, une certaine perturbation fait partie de la vie - la psychanalyse n'est pas promesse de tranquillité. On l'oublie facilement dans les périodes de l'efficacité à tout prix, du pragmatisme et de la vie sans rêves : l'adaptation produit le malaise dans la culture, elle simplifie le monde en le rendant orthopédique.
C'est à une ...rééducation de la question que ce numéro souhaite convier le lecteur. Il ne s'agit pas ici d'aller sur l'autre rive et de proposer l'inadaptation comme norme. Mais il reste à lever le manteau idéologique jeté sur le terme d'inadaptation, à envisager la manière dont il infiltre les pratiques quotidiennes, et à préciser les enjeux individuels et collectifs qu'il recouvre.
Auteurs au sommaire: Laurence Kahn, Yannick François, Philippe Meirieu, André Ouzoulias, Jocelyne Malosto, Gilberte gensel, Mario Magrini, Stéphane Audoin-Rouzeau, Antonio Alberto Semi, Françoise Neau, David Collin, Alain Boureau, Adam Philips, Pierre Bergounioux, Jean-Philippe Dubois, Michel Neyraut, Miguel de Azambuja, Jean Imbeault.
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La psychanalyse procède avec méthode dans l'exploration de l'inconscient et repère, ce faisant, un certain nombre de configurations plus ou moins classiques, non sans rapport avec celles cataloguées dans les manuels de psychopathologie. Mais ni la psychanalyse, ni d'ailleurs aucune autre approche travaillant avec un sujet humain, ne saurait prétendre à un savoir totalisant sur l'autre. C'est que cet autre est, d'une part, doté d'une capacité d'autoreprésentation et d'auto-théorisation dont il faut savoir respecter la singularité et les productions, leur automanifestation, et que, d'autre part, cet autre est habité par une altérité radicale.
La série d'essais constituant ce volume s'attache à indiquer, de diverses façons, en quoi la démarche psychanalytique la plus méthodique conduit un jour ou l'autre ceux qui s'y engagent dans des contrées psychiques mal cartographiées, aux repères flous, voire inexistants. Il s'agit d'aller à la rencontre de ce qui hante ces « quartiers aux rues sans nom » où l'on se perd sans l'avoir fait exprès. Où cependant, dans ces lieux mal éclairés, dans ces situations inédites, pourra, avec un peu de chance, se produire le plus vif de l'analyse, s'inaugurer une parole par laquelle il sera possible au sujet de s'expliquer avec son aphasie originaire, d'en découdre enfin avec son enfance, ou plutôt avec l'infantile, avec ce que le temps du calendrier n'aura pas réussi à faire passer.
" C'tait mieux avant. " Qui n'a prononc ces mots, avec navet, nostalgie, sans la moindre haine, et n'a pens que, oui, tout ce que nous aimions a trop vite disparu et qu'avant, - avant - les murs n'taient pas si brutales, les voitures pas si laides, les idaux pas si infantiles ? Bref, en ce temps-l la vie tait plus belle et le soleil plus chaud qu'aujourd'hui. " Avant " serait toujours connot par un peu d'origine et sa valeur suppose. La valorisation s'accompagne d'une dvalorisation qui reste non dite, et qui est violente. Ainsi va la haine du changement personnel et social. Or si " avant " trane aprs lui un imaginaire fragment d'origine, n'est-ce pas en quilibre avec ce que Freud appelle l'attente croyante, active en chacun ? Mais n'y a-t-il pas, malgr tout, du vrai dans l'ide d'un temps antrieur qui tait, certes, un semi-quilibre, mais que l'on n'a pas su maintenir, une sorte de " c'tait moins mal " ? Du vrai dans l'ide d'un regret qui laisserait entendre que le pass est mobile ? Ne pas avoir de regrets serait une illustration d'une vie sans pass, une vie qui confondrait le pass et l'avant.Et si avoir des regrets n'tait pas, comme on le croit d'abord, regarder vers le pass, mais accueillir le pass dans le prsent ?
Au sommaireJ.-B. Pontalis, " Quand ? " ; Dominique Scarfone, " Vers l'avant ? " ; Catherine Rodire-Rein, " Les paroles geles " ; Evelyne Tysebaert, " Il n'y a plus d'aprs " ; Hlne et Daniel Widlcher, entretien " L'avenir s'invente en rvant le pass " ; Alberto Semi, " La maladie de l'histoire " ; Henri Normand, " Je ne veux pas d'enfants " ; Carlotta Settel, " Au temps de la dvoration " ; Jean-Michel Rey, " L'instinct conservateur " ; Alain Boureau, " Entropie et misanthropie, suivi d'une rponse de Dinah Ribard " ; Elsa Marmursztejn, " La construction d'un pass meilleur l'historienne " ; Julie Claustre, " Nostalgie du Moyen ge " ; Christian Doumet, " Demain "Glossaire : Le GRIHL - C'tait mieux ailleursControverse : Jean-Michel Rey - Quelques remarques sur l'Affaire (Woerth-Bettencourt)Pollen : Jacques Andr - Les morts impensablesJournal de Jean Imbeault - Le Gupard
* La question semble sortie de Swift, de sa Modeste proposition concernant les
enfants des classes pauvres : « Un bébé sain et bien nourri constitue à l'âge
d'un an un plat délicieux, riche en calories et hygiénique [...] », etc. La
verve de Swift est politique.Trois siècles plus tard, le « plat délicieux »
apparaît dans la verve winnicottienne : « Le corps de l'enfant revient au
pédiatre. Son âme, aux hommes de la religion. Sa psyché appartient au
psychanalyste. Et son intellect au psychologue. L'esprit est pour le
philosophe. Le psychiatre veut les troubles mentaux [...] » ( La Nature humaine
).La question est cependant partie d'ailleurs, au fil de lectures sur les
enlèvements, par les Nazis, d'enfants (chrétiens) blonds aux yeux bleus, dans
les pays occupés principalement d'Europe du Centre et de l'Est. Le nombre des
enlèvements avancé par les historiens, en variant selon les idéologies de
l'époque (vingt mille à deux millions), a en effet donné le sentiment que les
enfants étaient une matière qui se prêtait tout particulièrement à
l'instrumentalisation, et qu'ils servaient à tout. Qu'ils étaient une matière
plastique, conciliante, et comme soumise à ce qu'on attend d'ordinaire d' un
enfant : qu'il se conforme à ce que l'adulte attend de lui.Entre les
rabaissements de l'enfant - objet réel ou fantasmatique de l'esclavagisme nazi,
mais aussi aujourd'hui de la pédophilie, de l'inceste et du viol, de la
prostitution, du travail, etc. -, et sa survalorisation - enfant merveilleux,
enfant sauveur -, la question n'a pas fini de se poser : à quoi de l'adulte
sert donc un enfant ?Au sommaire J.-M. Rey, « L'enfant, mesure de toute chose »
; H. Le Bras, « Reproduction, investissement, jouissance » ; H. Normand, « Je
veux un enfant » ; J.-F. Daubech, « Passions d'adultes » ; J.Ludin, « Le choix
de l'enfant » ; C. Doumet, « L'ours du réel » ; L. Kahn, « Usages d'un bâtard »
; J. Malosto, « Je t'expliquerai quand tu seras petit » ; A. A. Semi, « Le
destin d'être enfant »; D. Oppenheim, « Approche de l'enfant cancéreux » ; E.
Marmursztejn, « Effacer et soustraire » ; J. Claustre, « Les innocents » ; I.
A. Hirschmann, « Les enfants perdus », M. Pignot, « La triple responsabilité
des enfants dans la Grande Guerre » ; P. Bergounioux, « Rien de moins
(Entretien) » ; A. Phillips, « Après l'alerte », etc.
- Un amour sans limitesLettres " à ma mère ", ou lettres " à sa mère " quand le recueil est le travail d'un biographe, ou encore " à leurs mères " si c'est une compilation : le courrier publié des anciens enfants à leur mère est abondant, et semble vouloir récuser l'idée de séparation. Ainsi Vincent Van Gogh écrit-il à une " maman de près de soixante-dix ans ", avec une intimité non codée : " Le chagrin que nous éprouvons et éprouverons toujours d'une séparation et d'une perte est, me semble-t-il, instinctif ; sans lui nous ne pourrions nous résigner aux séparations, il nous aidera probablement plus tard à nous reconnaître l'un l'autre [...] ".C'est peut-être ce qui fait le ciment de ces lettres et les oppose à la fameuse lettre à son père de Franz Kafka : la " Lettre au père " a quelque chose de définitif, tous les anciens fils - et filles - de père peuvent y retrouver un père. En regard, quoi ? La perte et un doute terrible de ne savoir comment en dire le regret à la destinataire. S'il ne manque précisément pas de lettres à la mère sans complaisance ni concession, serait-ce qu'aucune n'a l'universalité de celle au père ?L'amour sans limite que nous avons eu pour nos mères, en reste-t-il quelque chose quand les années et la haine, éventuellement, quand l'oubli, la déception, la lassitude et la souffrance, les jours anciens, la griffe ou la paix du deuil, quand le lointain et le trop immédiat s'en sont emparés ? On souhaiterait que ce numéro considère, sans trop de précautions, ce que sont nos mamans devenues...
- Au sommaireCarlotta Settel, " Lettre à ma morte " ; Edmundo Gómez Mango, " Un amour sans pitié " ; François Gantheret, " Ô Mamma mia ! "; Gilberte Gensel " Eugénie G. à son fils " ; Jean-Claude Lavie , " Écrire à la chair mère " ; Jean-Philippe Dubois, " L'adresse perdue " ; Jean-Michel Lévy, " L'inconnu de l'adresse " ; Jean-Michel Rey, " La mère à contre-emploi " ; Sophie Houdard, " Le secret de l'abandon d'une mère " ; Stéphane Audoin-Rouzeau , " Lettre amère, 23 juin 1915 " ; Thierry Hesse, " L'écriture maternelle ", etc.
L'économie ? Une « science de l'Avidité dont toute mention d'avidité serait bannie », écrit Winnicott en 1945. Pour le psychanalyste britannique, « quand il s'agit de la planification de nos vies [.], le problème est que les penseurs font toujours des plans qui ont l'air formidable. Toute fissure qui apparaît est colmatée par un peu plus de réflexion, plus brillante encore et, en fin de compte, le chef d'oeuvre de construction rationnelle s'effondre à cause d'un petit détail comme l'AVIDITÉ dont on n'avait pas tenu compte. » Les auteurs de ce numéro tiennent compte de l'avidité et l'installent, avec l'actualité frappante de ce diagnostic, au coeur de l'aventure psychique.
"Pourquoi la guerre ?", demandait Freud en 1932. "Pourquoi le fanatisme ?" est une question à laquelle il est urgent de réfléchir, aujourd'hui où des individus, des groupes organisés, des foules et des dirigeants se comportent comme si la Raison n'avait pas été inventée, en se réclament d'un Dieu paranoïaque si ancien qu'on le croyait disparu.
Les idées religieuses sont pour Freud, en 1927, la « partie la plus importante » de l´« inventaire psychique d´une civilisation », en même temps que des illusions. Ces illusions sont parfois si contradictoires avec « ce que nous avons appris, avec tant de peine, sur la réalité de l´univers que l´on peut les comparer aux idées délirantes ». Dans la civilisation occidentale, l´inventaire psychique concerne les idées religieuses chrétiennes.
Contaminent-elles encore aujourd´hui, comme une maladie infectieuse - par Infektion, écrivait Freud - « institutions, lois et ordonnances culturelles », pourtant élaborées au nom de la Raison ?
Cette méditation sur la perte, où la chaleur de l'intelligence le dispute à la mélancolie humaniste, fait entendre quelques "conseils" inhabituels : " boire frais", c'est-à-dire ne pas se laisser entraver par des automatismes acquis ; s'abandonner, un peu, à la musique intérieure ; ne pas s'en tenir à la seule vertu du langage mais, sans pour autant s'en déprendre, accueillir les médiations non verbales, leur pénombre ; rêver son amour les yeux ouverts. En cours de promenade, le lecteur aura fait l'expérience de la limite du conscient et de l'inconscient, du sens et du non-sens, du formel et de l'informe. Il aura senti que le mouvement de la nuit ne cesse pas avec le jour.
Que les femmes tendent à occuper les hautes fonctions du pouvoir, ce n´est pas nouveau. La nouveauté, c´est qu´on attend aujourd´hui quelque chose d´elles parce que ce sont des femmes. Elles porteraient, sinon le sauveur, du moins l´idée de sauveur : de là viendrait, quand il existe, le sentiment d´évidence que seule une femme pourrait, éventuellement, ce qu´elle veut.
Mais une femme veut-elle quelque chose de spécifique ? Son mode de penser et les actions qui en découlent, est-ce une « chambre à soi », ou une pure invention des discours qu´hommes et femmes tiennent sur elle ?