Ida est morte, frappée par un camion. Sa disparition suscite le trouble : qui était cette femme discrète, dévouée à son travail de bonne à tout faire ? Rien ni personne n'élucide ce mystère. D'elle, il ne reste que les mots de celles qui ont croisé sa route. Des mots amers qui tracent en contrepoint un saisissant portrait : celui d'un monde égoïste et cruel, dont Ida était la victime silencieuse mais victorieuse.
Après la réhabilitation de la romancière, la découverte de la poète. Élégie pour une jeune fille en noir est un inédit de Hélène Bessette, seul texte de poésie dans son oeuvre. La forte tonalité autobiographique, l'extrême simplicité de la langue donnent à voir la confession et le regret d'une passion amoureuse qui s'adressent, au seuil de la mort, à une mystérieuse jeune fille en noir. Il s'agit d'un ultime livre bouleversant, soutenu par la force et la singularité d'une écriture conclusive et secrète.
Acclamée par de nombreux auteurs et critiques - Claude Mauriac, Alain Bosquet, Nathalie Sarraute ou Marguerite Duras (« La littérature vivante, pour moi, pour le moment, c'est Hélène Bessette, personne d'autre en France », disaitelle) - Hélène Bessette a publié 13 romans chez Gallimard entre 1953 et 1973, chacun mettant à mal les codes narratifs traditionnels. Dans son oeuvre, dont l'édition intégrale a été entreprise par Othello (Le Nouvel Attila), un seul texte fait exception, semblant s'écarter in extremis de la forme romanesque. Il s'agit d'Élégie pour une jeune fille en noir, sur lequel Hélène Bessette travailla les dernières années de sa vie.
Ce long poème lyrique peut être lu de plusieurs manières : comme la déclaration d'une femme vieillie (Je reste sidérée / d'être vieille / Je pensais tant ne l'être jamais) à la jeune fille aimée, confession rétrospective d'un amour homosexuel resté secret et impossible. Ou comme une adresse, depuis la vieillesse, à la jeune fille qu'elle était et qui n'est plus. C'est une sorte d'« élégie autobiographique », écrite au seuil de la mort - Hélène Bessette s'y livre dans une langue tendue, magnifiquement dense et musicale. Dans ce long chant mélancolique, elle retraverse sa propre vie, sa propre jeunesse, elle se raconte avec l'intransigeance qui aura toujours été la sienne, poussant jusqu'au bout, une dernière fois, l'exploration des singularités de sa langue.
Voici la première édition intégrale des textes et manifestes d'Hélène Bessette, à savoir "Le Résumé" (première éd. Laureli 2009) suivi des "Résumés du Résumé", série de manifestes qu'Hélène Besette diffusait sous forme de père d"insérer, et des deux heures d'entretien avec Jean Paget sur l'antenne de France Culture diffusées en 1967 sous le titre "Aujourd'hui Hélène Bessette".
Garance Rose, ou celle qui part.
Garance rose ou le double de l'auteur, qui sur le thème du départ et de la fuite dresse un somptueux portrait de femme, à la fois double de l'auteur et hommage à sa mère.
(Rose était le prénom de la mère de Bessette.) « L'héroïne est absente.
Absente de Paris. Héroïne par défaut. En fuite. Disparue. Morte. (Peut-être). En tout cas non présente.
Le nom seul subsiste.
Qui était cette personne ?
Qui est cette personne ? Qui est cette femme ? Mais qui était donc cete dame-là ? »
Hélène Bessette, 72 ans, sans éditeur (Gallimard vient de la "lâcher" après 13 livres publiés), sans bureau, sans Légion d'Honneur et sans Petit Livre.
Confession-bilan sur son oeuvre et ses influences littéraires, pamphlet radioscopique, l'auteure irrécupérable regarde de travers Saint-Germain-des-Prés et ses écrivains aux flatteuses photographies de couverture.
Ces mémoires complètement inédites ont été reconstituées à partir des deux uniques versions existantes, le manuscrit et le tapuscrit.
« SANDEMAN plus beau que jamais.
Noir et gigantesque.
Christ d'ébène aux bras repliés.
En deuil de tous les cimetières du monde.
En deuil de ses milliards d'oncles.
Avec bras de bois blancs. Repliés. Croisés.
Sur des résurrections impossibles ».
Le jeune ingénieur Sandeman, en deuil de son oncle milliardaire, espionne jour après jour sur son télélecteur la vie de Nadia, une star de cinéma qui, pour avoir dénoncé la disparition de son chien, finit bonniche... et persécutée.
Mais Nadia n'a-t-elle pas tué son propre toutou pour s'assurer succès et notoriété ?
Ce texte consacré au deuil et à l'inconscient s'en prend à la pensée minutée et à la parole débridée de nos sociétés. C'est aussi un hommage à l'art du roman.
Hélène Bessette détourne la série B comme elle a détourné le genre policier dans Vingt minutes de silence. C'est Moravagine à l'époque de la téléréalité.
« Il ne s'est rien passé (et c'est irréparable) ».
Dernière phrase, testamentaire, du livre.
Le premier roman d'Hélène Bessette : un mélo poétique. "Lili pleure" est le roman le plus narratif, mais aussi le plus incarné d'Hélène Bessette : sa mère tyrannique empêche Lili d'épouser l'homme qu'elle aime ; de dépit, elle en épouse un autre, qui est déporté à la guerre puis revient alors que Lili est cette fois amoureuse d'un berger. Abandonnée par son mari, délaissée par le berger, Lili se retrouve seule avec sa mère, plus insupportable que jamais. Seulement Lili ne pleure plus, et l'histoire racontée par Bessette finit sur un éclat de rire cynique, qui restera à jamais celui de la romancière. L'histoire de l'enfance méconnue, du désir écrasé, de l'amour contrarié, du malheur renouvelé... Bessette crée un style proche de la cantilène, qui rappelle les complaintes et les mythes. Elle l'applique à une jeune fille égarée.
« Roman de l'étrange dont toute la substance semble faite de sensations visuelles, olfactives, tactiles, d'associations de mots et de sonorités, de répétitions incantatoires, groupées avec recherche, comparables à des reflets dans l'eau, des bourdonnements d'insectes, des airs sans suite, tantôt chantés, tantôt fredonnés, à travers lesquels se trame une Aventure de l'Esprit en trois parties : le beau voyage d'une jeune personne en route pour « les Îles », la découverte des nouveautés du Tropique, ses mollesses, ses accablements, se double d'une évasion totale de l'Esprit hors du monde occidental et mécanique, fabriqué et faux.
Une nouvelle optique des profondes valeurs humaines s'impose à la faveur de ce long exode vers des paysages lourds de nature resplendissante. Recherche intérieure aussi passionnante que le décor grandiose, serein et pur... »
Ida est morte. Bonne effacée, invisible, tout à coup sous les roues. Ida a osé mourir : le scandale.
Sa mort suscite la crise. Que savait-elle, à quoi jouait-elle, pourquoi est-elle morte ? Ida devient l'allégorie des personnages banals et inexistants, dont la romancière sonde les secrets et les angoisses.
Le texte le plus emblématique et le plus fameux d'Hélène Bessette, redécouvert par Laure Limongi dans sa collection LAURELI en 2012, vient rejoindre les oeuvres complètes amorcée par Othello en 2016.
« UN VRAI CRIME. La preuve : Monsieur s'endormait le soir en lisant des romans policiers. » 20 minutes de silence, c'est le temps qu'il a fallu à cette famille criminelle pour prévenir le médecin après la mort de leur mari et père.
Inspiré d'un fait divers réel, tricoté à la manière ludique d'Hélène Bessette, voici un roman articulé autour d'un fils et de sa mère, tour à tour accusés...
Mais sans réel décor ni intrigue, comme seule sait en créer l'écrivain préféré de Raymond Queneau et de Marguerite Duras.
Hélène Bessette dissout le roman à mesure qu'il progresse, remettant tous les indices, toutes les lois, toutes les évidences en question. Ainsi ses chapitres s'appellent-ils « Atmosphère », « Poème des questions », « Poème des solutions »... Et tout devient suspect.
Ici, le criminel, c'est l'écrivain, qui s'attaque au genre du roman policier en détournant l'enquête, sapant au passage la notion de personnage, voire de vraisemblance. Le mystère est partout, l'étonnement du lecteur aussi.
Issu du fonds croisé de l'IMEC et de la NRF, cet ensemble est exceptionnel par le nombre, la variété, et les par ti pris radicaux des jour nalistes et écrivains les plus en vue.
Entre l'ar ticle le plus cour t (15 lignes assassines de Bernad Pivot dans Le Figaro) et le texte fondateur de Marguerite Duras dans L'Express (« Lisez Hélène Bessette! »), on trouvera aussi : des critiques françaises, suisses, belges, anglaises ou hollandaises ; des droits de réponse de l'auteur souvent mécontent ; des por traits de la petite institutrice du Nord dans son logement de fonction... sachant que Bessette ne se gêne pas pour annoter ou rayer rageusement cer tains ar ticles.
La presse est obsédée par le non-conformisme du style, bien sûr... mais aussi par la biographie de l'auteur. Dès son premier roman, elle est un « Mystère » que les jour nalistes vont essayer de percer !
Ils s'échinent à décrire le ton atypique de l'auteur, ne trouvant à la comparant qu'à des poètes - Préver t - ou à des peintres - des primitifs flamands, aux Pointillistes -.
Quand ce n'est pas à Mouloudji !
On pourra à bon droit se moquer rétrospectivement des jugements lapidaires abattus sur la tête de Bessette... « Tant de gâchis, alors qu'il y a tant de choses sérieuses à faire... y compris en littér ature ».
Mais on se réjouira d'une diversité et d'un sens de la formule qui parfois touchent plus vrai qu'on ne le pense. « Une angoisse existentielle... de Prisunic », ou « Du Labiche repensé par Schopenauer. »
Hélène Bessette met en scène avec humour et cruauté des personnages dont la vie n'a de consistance qu'en tant qu'ils s'agitent, s'opposent, provoquent le scandale. Portier grincheux, soubrette insatisfaite de sa condition, actrice en pleine ascension mais pas encore célèbre, fils de famille sur le retour, bourgeoise entretenue, noble déchu, chacun se retrouve enfermé dans sa propre vie à double tour sans cesse resserré par le temps qui passe dans le mensonge et la compromission. La société se mue en un asile de fous qui ne dit pas son nom.
Une famille bourgeoise raconte la vie de sa bonne, Ida, tout juste décédée. Dans«Le résumé», l'auteure explique sa théorie littéraire sur la conceptualisation de ce qu'elle désigne comme roman poétique.
Une jeune mariée, Louise, décroche le gros lot à un jeu radiophonique. Transformée, radieuse, elle se prépare avec son époux Marcel à une vie de plénitude matérielle. Sa fortune rachètera-telle tant d'années de "mort lente" et "déguisée" ? Ou ce surcroît d'existence précipitera-t-il la dissolution du couple et de leurs amis ? Louise et Marcel traversent les boulevards et la nuit parisienne en faisant étalage de leurs désirs.
Appartement mobilier coiffure chirurgie voyage enfant peut-être... rien n'échappe à leur envie ni à leur ambition. La Tour tend à la société de consommation le miroir du bonheur en toc, de la publicité effrénée, des objets standardisés, de la fortune coupée de la vie intérieure.