On ne connaît pas son nom mais on le reconnaît tout de suite : c'est un lascar de banlieue, casquette vissée sur l'oreille, tee-shirt, jean, les yeux mi-clos et le sourire béat du type qui zone tranquille, et qui finit sa journée avec un petit joint allongé sur le toit de son HLM. Une vie paisible en quelque sorte, sans grands besoins. Mais voilà que le destin se charge de lui rappeler qu'il est pauvre, très pauvre : que faire pour se procurer cette paire de «Dunk record 2008» hors de prix trônant dans une vitrine ? C'est là où notre gamin commet l'irréparable : il décide de travailler. Et le voilà embauché dans une boucherie, où il passe ses journées à vider des poulets. Gilles Rochier décline ici ses thèmes favoris autour d'une courte fiction, une petite fable amère, drôle, et sanglante !
Gilles Rochier vient de la banlieue, et quand il en parle, on le sait de suite. Il connaît la zone dans le quartier, les squats en soirée avec les potes, le kebab du coin qui ferme à pas d'heure, les voisins qui hurlent et s'engueulent, les ascenseurs fracassés, la galère. Et ses récits nous montrant tout cela sont plein d'amour pour ces quartiers, pour SON quartier, et son regard sur ses « voisins » est toujours tendre.
Un an après Dunk chicken and blood, voici la suite des aventures du lascar des banlieues, personnage fétiche de Gilles Rochier. Mais attention, la couverture annonce la couleur : cette fois-ci, finie la zone urbaine, notre petit gars se met au vert ! C'est facile : il suffit de prendre le bus, d'attendre le terminus pour débarquer au bout du monde. Et là, miracle : on l'accueille, on l'invite à manger, on lui offre l'amour. C'était donc si simple, le bonheur, il suffisait de partir ? Ou bien est-ce une plaisanterie qui va se terminer en mauvais trip, avec réveil nocturne, morsure de canard et découvertes morbides ?
Dans ce nouveau court récit, Gilles Rochier s'amuse à poser son personnage urbain au milieu de nulle-part, loin de son univers familier, mais toujours plus près des humains et de leurs drames.